A la lisière sud de Jérusalem se trouve le parc archéologique de RamatRahel. Sur le site, un jardin vieux de 2 500 ans, probablement planté par lesJudéens locaux, renferme de nombreux secrets du passé dans l’attente d’être misau jour. Au regard du système d’irrigation élaboré, nul doute qu’il s’agit biend’un jardin antique. Mais l’essence des plantes cultivées reste un mystère.
Des recherches récentes, effectuées sur du pollen antique, enthousiasment leshistoriens et spécialistes de la nature. Car, parmi les espèces d’arbres et deplantes dont l’analyse du pollen a permis de déterminer l’existence, se trouvele citronnier. Un arbre fruitier qui n’est pas originaire d’Israël.
Une découverte d’autant plus intéressante que l’ancêtre du citron n’est autreque le cédrat (ou etrog), symbole de la fête de Souccoth, aux côtés du myrte,de la branche de palmier et de la saule. Originaire d’Asie du Sud, et plusprécisément d’Inde, le cédrat est le premier agrume à se diffuser dans lesrégions d’Asie, puis d’Europe, dès le troisième siècle avant Jésus-Christ.
Alors, est-il possible que des arbres importés à Ramat Rahel par des étrangers,il y a des milliers d’années, aient eu un tel impact sur la terre d’Israël etses traditions encore perpétrées aujourd’hui ? C’est ce que pensent deschercheurs du site de Ramat Rahel : le professeur Oded Lipschits, le docteurYouval Guadot et Dafna Langgut. Et c’est la raison pour laquelle ils déploientautant d’énergie pour percer les secrets des dépôts du pollen de l’ancienjardin. Dans l’espoir qu’un jour, ils pourront parvenir à la reconstitution dusite dans toute sa splendeur d’antan.
Tout est dans le plâtre
Langgut est palynologue, c’est-à-dire qu’elle étudie le pollen et sesspores. Cette spécialiste du pollen antique de la région du Levant a étéapprochée par des archéologues.
Elle se souvient : “Nous n’avions aucune idée de ce qui poussait dans lejardin. On m’a demandé d’analyser le pollen fossilisé qui se trouvait dans lesol. Mais je leur ai dit que je ne pensais pas qu’il soit préservé.”
Puis un jour, à l’occasion d’une conférence sur Ramat Rahel, elle apprend quedes inscriptions ont été trouvées dans le jardin, inscrites sur du plâtre. Cequi lui donne une idée : recueillir et étudier les traces de pollen coincéesdans le plâtre. “Si le plâtre a été fabriqué au printemps, période defloraison, nous pourrons savoir ce qui poussait dans ce jardin, car le pollenaura été préservé dans le matériau”, explique-t-elle.
Et tel sera le cas. Après analyse en laboratoire des couches de plâtre, Langgutdécouvre avec excitation que toutes contiennent du pollen fossilisé. Et l’uned’entre elles se révèle particulièrement intéressante : elle contient desassemblages de plantes qui ne sont en aucun cas des espèces types des montagnesde Judée.
La découverte de pollen d’Etrog constitue l’une des plus grandes avancées pourles chercheurs, mais aussi un grand moment-clé dans la carrière de Langgut quidéclare : “Je peux vous dire que j’étais stupéfaite de découvrir des traces depollen de citron, car je sais que ce n’est pas une plante de cette zone. J’enai conclu qu’elle avait été importée. J’ai également observé d’autres arbresexotiques, comme le cèdre du Liban.” Et d’ajouter qu’au vu des analyses depollen et des données archéologiques recueillies, il est clair que la créationde ce jardin avait fait l’objet d’un important travail : “Il a été conçu pourimpressionner”. Grandeur d’antan
De tous temps, du jardin d’Eden aux jardins suspendus de Babylone, lesparcs antiques sont sources de nombreuses légendes. Alors quels sont les autresmystères cachés du jardin de Ramat Rahel ? Le site a été découvert il y aquelques années par des chercheurs de Tel-Aviv et leurs collaborateurs del’Université Heidelberg en Allemagne. Selon eux, il s’agit de la premièreexcavation, grandeur nature, de ce type de site archéologique, de tout leLevant antique préhellénique.
Un fait intéressant pour les férus d’archéologie. Pour Lipschits, lesdécouvertes de Ramat Rahel vont apporter des informations archéologiquesprécieuses sur les jardins antiques du Moyen-Orient. A quatre kilomètresseulement de la Vieille Ville de Jérusalem, le jardin de Ramat Rahel cacheencore de nombreux secrets.
Pour l’heure, une maquette grossière du site a été élaborée. Les chercheurssavent que des arbres indigènes, comme les figuiers ou la vigne, étaientplantés là. A cela s’ajoute la preuve de l’existence de myrtes et citronniers,de noyers persans, bouleaux et cèdres du Liban.Selon les chercheurs, les classes dominantes étalaient leurs richesses par degrands jardins. Maintenant que les informations affluent grâce aux études depollen, les archéologues seront en mesure de reconstituer le jardin sous saforme originelle. Pour que les générations actuelles admirent l’opulenced’autrefois.