Galei Tsahal a aussi vocationd’être un outil éducatif, dont les objectifs multiples vont de l’intégrationdes nouveaux immigrants au renforcement des liens avecla langue hébraïque et àl’amélioration des connaissances de la terre d’Israël. Malgré ces objectifslouables énoncés lors de sa création, Galei Tsahal est plutôt devenue au fil deces dernières décennies, un organe médiatique post-sioniste ; offrant plusd’une fois une tribune aux ennemis d’Israël, tout en en s’appliquant à étoufferla dissidence, représentée par ceux qui prétendent défendre le patrimoine et laculture sioniste. Aujourd’hui encore, cette attitude post-sioniste, fleuritdans ses émissions. Micha Friedman, le présentateur de l’édition du soir, àsept heures, vient d’exprimer pour la première fois en 15 ans, lesappréhensions qu’il avait eues, lors de la reprise du mont Hermon au terme dela guerre du Kippour. Ainsi donc, l’animateur de Galei Tsahal, s’affirme ànouveau comme une personnalité qui s’identifie clairement avec le sionisme. Lesconséquences de cet aveu personnel, n’ont pas tardé à se faire sentir. YaronDekel, à la tête de Galei Tsahal, s’est exprimé lundi devant la commission desaffaires économiques de la Knesset pour annoncer que, parmi les 35 nouvellesrecrues, un tiers sont issues de classes défavorisées et neuf sont religieuses.
Bien plus inédit encore, pour la toute première fois, des étudiants de YeshivaHesder vont être autorisés à servir dans Galei Tsahal, dans le cadre del’accomplissement de leurs devoirs militaires. Une nouveauté qui rompt avecl’usage en vigueur jusqu’ici, lequel favorisait trop souvent les jeunes gensissus de la région de Tel-Aviv, fils et filles de journalistes et autres VIP,personnalités d’horizons divers, qui bénéficiaient d’un favoritisme évidentpour intégrer ce secteur privilégié de l’armée, au terme d’un processusd’admission qualifié de « dynastique ».
Le changement se manifeste aussi dans le contenu. Galei Tsahal aujourd’hui estbeaucoup plus attentive à la culture et au patrimoine juifs. Sa programmationpour les fêtes juives et israéliennes s’est sensiblement améliorée. Même sesrelations avec le public connaissent une embellie. Dekel a nommé un nouveaumédiateur, Eran Eliakim, dont les efforts ont consisté entre autres, à lacréation d’une page web pour communiquer son adresse e-mail, afin de faciliterson contact avec le public.
Quand le temporaire devient permanent Pour autant, le Messie se fait encoreattendre, en tout cas il n’a toujours pas frappé à la porte de Galei Tsahal, oùtout n’est pas encore parfait, loin s’en faut. Là où le bât blesse, c’estd’abord au niveau du statut juridique de la station. En 1969 déjà, la Knessetavait placé Galei Tsahal sous l’aile de l’IBA, (Israel Broadcasting Authorityou Autorité de téléradiodiffusion d’Israël) qui contrôle les médias israéliens.Mais l’IBA n’a pas fait son travail. Galei Tsahal bénéficie d’un régime defaveur qui couvre des irrégularités ; d’un côté, la station est financée parl’Etat, sur le budget du ministère de la Défense et profite du statut de radiopublique, de l’autre, elle touche des revenus publicitaires en tant qu’organismeprivé.
Il y a dix ans, quatre stations de radio régionales ont fait circuler unepétition adressée à la Cour suprême, pour dénoncer les profits publicitairesindus dont bénéficie la radio de l’armée, grâce aux revenus générés par lesannonceurs. Grâce à son budget publicitaire, Galei Tsahal peut s’offrir dutemps d’antenne dans des conditions privilégiées, à tel point qu’il lui estpossible d’émettre sur tout le territoire, alors que les stations de radiosrégionales ne peuvent se le permettre et sont limitées géographiquement. LaCour suprême a rejeté la pétition, mais seulement après adoption d’une loi parl’Etat, autorisant la station à diffuser provisoirement des annoncespublicitaires, en attendant une législation adaptée, qui régirait définitivementson mode de fonctionnement.
Mais, comme c’est souvent le cas, le temporaire s’est avéré devenir de factopermanent. La Knesset renouvelle régulièrement cette autorisation temporaire,tous les ans ou presque. Mais la dernière en date ayant expiré le 31 mai, ilest permis d’en déduire que la publicité diffusée sur Galei Tsahal depuis, estparfaitement illégale.
Et c’est précisément pour cette raison que la commission des affaireséconomiques de la Knesset, vient d’être convoquée. A son ordre du jour : uneproposition dans le but d’établir des règles précises quant à la diffusion dela publicité sur les ondes de la station. Proposition qui comprend desrestrictions évidentes, comme l’interdiction de messages publicitaires quiinsulteraient ou blesseraient les sentiments ou les croyances religieuses de lapopulation, les infractions à la loi ou les contenus qui inciteraient àtroubler l’ordre public, etc. Mais certaines clauses, plus douteuses, faisaientégalement partie du package. Il s’agit de restrictions qui porteraient sur despublicités à caractère politique, des contenus idéologiquement controversés ouencore des appels pour d’éventuels changements de législation.
Sacro-sainte liberté de la presse ? En fait, les mêmes restrictionss’appliquent aujourd’hui à l’ensemble des stations, radios et télévisions. Maiselles représentent une forme de censure à l’encontre des annonces publicitairesproduites par des associations, comme Efrat par exemple, qui milite contrel’avortement, ou émanant de groupes de défense des homosexuels, de Juifsrésidant au-delà de la Ligne verte et bien d’autres encore. Dans une démocratiequi se respecte, la liberté d’expression doit être garantie et il ne devraitpas y avoir de place pour de telles restrictions, qui sont inacceptables. Tantque le message publicitaire ne viole pas la loi, n’incite pas à la violence etne blesse pas les sentiments et les croyances des uns et des autres, tant quel’annonceur paie, il ne devrait y avoir aucune restriction pesant sur lecontenu. Pourquoi certains journalistes seraient autorisés à utiliser lesmédias pour s’exprimer librement dans leurs colonnes ou éditoriaux, tandis qued’autres seraient limités ? Il est grand temps que notre société s’ouvre audébat public, qui ne doit pas être géré et monopolisé par les journalistes,présentateurs et rédacteurs en chef.
Il est notoire que toutes ces questions n’ont pas à être débattues par laKnesset, et ce pour une raison toute simple ; comme le conseiller juridique dela commission des affaires économiques, Etti Bendler, l’a expliqué, enl’absence d’une loi statuant sur la station de radio de l’armée et sonfonctionnement, et alors que l’autorisation provisoire a expiré, on ne peut pasau vu du vide juridique qui règne, initier des débats en vue de légiférer surses principes de fonctionnement.
Par conséquent au jour d’aujourd’hui, toute publicité sur Galei Tsahal, estillégale.
Une législation qui tarde à venir Quoi qu’il en soit, les débats de lacommission ont porté à la connaissance du public quelques révélationsintéressantes. Par exemple, les revenus publicitaires de Galei Tsahal sont del’ordre de 20 millions de shekels et représentent près de la moitié de sonbudget annuel.
Dekel a pourtant affirmé que les revenus publicitaires de la station nereprésentent que 10 % de son budget, et que du fait, elle ne serait pasprivilégiée par rapport aux autres fréquences et ne constituerait pas unemenace. Pourtant, nous avons constaté que la publicité sur les médias publicsreprésente environ 60 % de part de marché des publicités diffusées sur lesondes.
Ce qui prouve bien que Galei Tsahal bénéficie bel et bien de privilèges, sansoublier que les fonds alloués à la radio publique proviennent des denierspublics et qu’à ce titre les auditeurs mériteraient des émissions diffuséessans publicité. Comme l’a souligné le député Moshe Feiglin (Likoud) dans ladiscussion, l’existence même de la station de radio Galei Tsahal estdiscutable. Dans une démocratie moderne, il y a une contradiction à conjuguer lesintérêts de l’armée avec l’indépendance des médias. Le fait que des soldatsfassent leurs classes dans une station de radio subordonnée à des intérêtscommerciaux pose également problème. Il est grand temps que l’avenir de GaleiTsahal soit sérieusement débattu et que les décisions difficiles soient prises.Mais en attendant, il serait bon que les publicités soient interdites.
Les auteurs sont respectivement vice-président et président d’Israël MediaWatch (www.imw.org.il).