A priori rien ne ressemble plus à un vélo qu’un autre vélo. Pourtant, ce moyen de transport, qui reste dans certaines parties du monde le principal mode de locomotion, a pris des formes très variées, parfois surprenantes, et son évolution se poursuit. Depuis sa création il y a quelque 200 ans, le vélo a connu de multiples transformations pour s’adapter aux modes, aux contraintes et pouvoir ainsi rester toujours aussi utilisé, pratique et respectueux de l’environnement.Jusqu’en mai 2018, le musée des Sciences Bloomfield de Jérusalem accueille une nouvelle exposition qui rend hommage à la bicyclette et à ses inventeurs, au plus grand bonheur des amoureux du vélo et de tous les curieux qui s’intéressent à son évolution au cours des deux derniers siècles. L’événement marque aussi les 25 ans du musée scientifique.Le Pr Ido Bruno, designer industriel à l’école des Beaux-Arts de Bezalel et passionné du deux-roues, ainsi que le Dr Amir Ben Shalom, responsable des expositions à Bloomfield, sont les commissaires de cette rétrospective, la première de cette importance jamais organisée en Israël sur le sujet. Sur 1 500 mètres carrés répartis à l’intérieur et à l’extérieur du musée, on peut admirer des dizaines de modèles différents de bicyclettes (et même des vieux tricycles) venant d’Israël et de l’étranger, dont des modèles uniques de collections historiques provenant du Canada, des Etats-Unis et des Pays-Bas.Une des pièces les plus remarquables provient justement de Hollande : il s’agit de la bicyclette utilisée par la reine Beatrix des Pays-Bas pour ses trajets allers-retours à l’école. Autre vélo chargé d’histoire, celui ayant appartenu à Gino Bartali, deux fois vainqueur du Tour de France et deux fois de celui d’Italie, le fameux Giro. Mais ce coureur cycliste ne s’est pas contenté d’être champion, c’est également un héros. Pendant la Deuxième Guerre mondiale, Bartali, alors âgé d’une vingtaine d’années, a parcouru son pays de long en large pour aider la Résistance italienne et les juifs. Il a par exemple transporté de faux documents dissimulés dans le guidon et l’armature de sa bicyclette, qu’il remettait ensuite aux juifs italiens, les sauvant ainsi d’une mort certaine. Il a été reconnu « Juste parmi les nations » à titre posthume, pour avoir aidé des centaines de juifs.Un deux-roues qui a fait du cheminLe deux-roues comme moyen de transport a été lancé pour la première fois à Mannheim en Allemagne à l’été 1817, par le baron Karl von Drais. Celui-ci avait surnommé le premier vélocipède « machine à courir ». Il était cependant particulièrement inconfortable, qualifié de « secoueur d’os » pour celui qui s’aventurait à l’enfourcher. Le vélocipède, par son aspect tellement démodé et étrange, a bien évidemment une place de choix dans l’exposition. On ne peut s’empêcher de se demander comment les utilisateurs de cet engin réussissaient à monter et à descendre de la selle sans se casser le cou… Egalement présentés, des modèles sans pédales ainsi que des modèles pliables et motorisés. On y trouve aussi le Mobike, un vélo dernier cri créé par une société chinoise, qui incorpore une application pour téléphone mobile permettant aux abonnés de débloquer, grâce à un code, un vélo laissé au hasard des rues. Un système de « partage de vélos » qui a un énorme avenir devant lui. Les modèles chinois sont d’ailleurs bien représentés avec le « Flying piegon », vélo le plus populaire de par le monde avec 500 millions d’unités produites au cours des 60 dernières années. Il semble cependant que ce deux-roues ait fait son temps en Chine et que ses utilisateurs s’en soient lassés. Face à ce constat, et de peur que les habitants de l’empire du Milieu n’optent pour la voiture au risque de dégrader encore l’environnement du pays, les autorités se sont donc dépêchées de lancer le Mobike. Et cela a fonctionné : la Chine s’est remise à pédaler, explique le Pr Ido Bruno.On admirera aussi des vélos originaux nés de l’imagination de certains comme l’étonnante bicyclette créée par le designer israélien Izhar Gafni à partir de cartons recyclés et dont le coût se chiffre à une trentaine de shekels. Si ce vélo devenait populaire, autant dire que les voleurs de bicyclette deviendraient vite une espèce en voie de disparition !Le tour du sujet L’exposition est également l’occasion d’apprendre des choses fascinantes que peu de personnes soupçonnent. Combien d’entre nous savent par exemple que les frères Wright, considérés comme les inventeurs de l’avion, étaient des cyclistes et des mécaniciens hors pair, qui ont utilisé leurs bicyclettes pour leurs expériences ? Ou que l’inventeur de la voiture en 1885, l’Allemand Karl Benz, a été le premier à avoir l’idée de relier un moteur à un tricycle ? A voir cela, on se demande bien où nous en serions sans les vélos…Des ateliers interactifs jalonnent le parcours de l’exposition et répondent aux nombreuses questions que l’on pourrait se poser sur le sport cycliste. Si vous vous êtes déjà interrogés sur les raisons pour lesquelles les coureurs du Tour de France sont quasiment à l’horizontal sur leur guidon quand ils grimpent en montagne, vous trouverez la réponse en vous exerçant dans un tunnel où les vents soufflent pour reproduire les conditions d’une ascension à vélo. Et vous comprendrez que la position quasi allongée permet de réduire l’effet freinant des vents.Les plus petits ne sont pas oubliés et pourront faire du vélo dans une sorte de tube géant, ou sauter au-dessus de coussins gonflables. Les adultes, quant à eux, pourront enfourcher un tandem, tandis que les handicapés trouveront à leur disposition un vélo guidé qui avance grâce à la force motrice provenant de leurs mains. D’autres aspects de la rétrospective s’intéressent à l’évolution des mécanismes de cadenassage des vélos, aux avantages de la bicyclette et aux raisons qui font que ce moyen de transport aide les habitants des pays pauvres. Les bricoleurs jetteront un œil particulièrement attentif aux pièces détachées de bicyclettes proposées depuis l’apparition de ce moyen de transport, telle cette « selle hygiénique » pour les femmes inventée au XIXe siècle. Et se régaleront de démonstrations sur la mécanique du vélo et sur ses réparations.L’exposition se prolonge jusqu’au mai 2018. Pas d’excuse donc pour la manquer. Elle rejoindra ensuite le musée des Sciences de Brême en Allemagne, la cité des Sciences de Naples et enfin le musée canadien des Sciences et de la Technologie à Ottawa.
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